Paul-Louis Courier

Cronista, panflettista, polemista
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prec de la comtesse de Salm-Dyck le 4 novembre 1810 De M. Clavier De M. Silvestre de Sacy Suiv

Monsieur
Monsieur Courier
Ancien officier d'artillerie
Membre de la Légion d'honneur
Poste restante Paris le 10 novembre 1810
A Rome

J Pierre-Édouard Lémontey Pierre-Édouard Lémontey (1762 - 1826)
 
’ai voulu, mon cher Courier, tirer au clair l’affaire de la saisie de vos livres, et j’ai fait parler un Directeur général de la librairie, M. Lémontey 1 que vous pouvez avoir vu plusieurs fois chez moi, et qui est l’un des censeurs. On est bien persuadé que c’est par étourderie et non par malice que vous avez taché le mss. De Longus ; on n’est peut-être pas éloigné de croire qu’on a depuis étendu la tache. Mais vous avez fait deux fautes ; la première de ne pas avoir fait votre déclaration en faisant imprimer ; le seconde de ne pas avoir envoyé une copie pour remplacer dans le mss. La feuille tachée. Vous offrez, je crois, dans votre lettre, de déposer à la Bibl. Imp. De Paris la copie faite par vous, par Furia, etc. Il faut que vous m’envoyiez cette copie pour la déposer ; que vous y joigniez une de la feuille tachée, que je remettrai au Directeur général2 de la librairie pour qu’il l’envoie à Florence ; et vous aurez la main levée de tous vos livres. Comme cela est très important pour vous, parce que cela fera taire tous les Italiens, je ne doute pas que vous fassiez tout cela le plus promptement possible. On m’avait trompé en me disant qu’on avait défendu aux journaux de parler de votre Longus, j’ai vérifié le fait et il n’y a eu aucun ordre pareil. Enfin, on est pleinement convaincu ici de votre étourderie, de vos connaissances en grec, et de la jalousie des Italiens. Vous pouvez donc vous remettre aux manuscrits, et s’il vous en tombe sous la main quelqu’un de Pausanias2, me le collationner. Tout à vous

Clavier

Voilà donc enfin cette pauvre Chloé lavée de toutes les taches de la calomnie, et prête à recouvrer sa liberté aux dépens de toutes les furies ou furias. Je vous en félicite bien sincèrement car j’ai pris au sort de cette aimable fille un intérêt sans doute un peu personnel, et je voudrais bien que le dégoût que vous a donné son entrée dans le monde ne vous empêche pas de nous chercher encore quelque titre perdu des enfants de cette famille. La mienne ne vous oublie point. Nous parlons souvent de vous, Monsieur, mes enfants4 regrettent leurs parties de volant et moi la lecture et les observations sur les tragédies de Racine5 .
Adieu, mille et mille amitiés.


[1] Pierre Édouard Lémontey (1762-1826) : Fils d'un épicier lyonnais P.-É. Lémontey naît à Lyon le 14 janvier 1762. Après de brillantes études, il s'inscrit en 1782 au barreau de sa ville natale, mais s'oriente très vite vers les lettres. Sur le plan politique, il défend la cause des protestants qui, rendus à l'état-civil par les édits de 1787, revendiquaient les droits politiques. Il rédige le cahier des doléances du tiers-état de Lyon pour les États généraux et, au titre de cet ordre, il est élu à l'Assemblée législative, dont il devient successivement le secrétaire et le président. Ce modéré soutient les principes d'une monarchie constitutionnelle et n'approuve pas les mesures envisagées contre les émigrés
Il s’exile en Suisse pour se soustraire à la Terreur et revient en France après la chute de Robespierre.
En 1797, il abandonne la politique et s’installe à Paris pour se consacrer exclusivement aux lettres.
En 1804, sa formation d'avocat lui permet d'être nommé jurisconsulte auprès de l'administration des droits réunis. Peu après, grâce à Fouché, il est désigné comme chef du bureau de la police littéraire, chargée de la censure politique des théâtres.
Dans sa mission de censeur impérial des théâtres, Lémontey ne tergiverse pas : il retranche ou change les vers qui, dans les chefs-d’œuvre du Théâtre français, pouvaient être applaudis en référence à la situation politique contemporaine.
En 1814, Lémontey se rallie sans problème à la Restauration. Le nouveau régime lui conserve ses fonctions de censeur du théâtre et sa pension. Il reçoit la Légion d'honneur. Il est élu à l'Académie française le 25 février 1819, au fauteuil de l'abbé Morellet décédé le 12 janvier précédent.
Il meurt à Paris le 26 juin 1826. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise.  Note1
[2] Il s’agit de Joseph Marie Portalis, comte d’Empire (1778-1858).  Note2
[3] Clavier travaillait à ce moment à sa traduction en sept volumes de la description de la Grèce par Pausanias.  Note3
[4] Etienne Clavier et son épouse avaient deux filles : Herminie, née le 29 juillet 1795 à Nonville, commune de Nemours et Esther, surnommée Zaza, née le 8 mai 1798 à Nonville. L’aînée épousera Paul-Louis Courier le 12 mai 1814, à Paris, mairie du VIIe arrondissement. Herminie se remariera après la mort de Courier avec Théodore Maunoir, chirurgien suisse, proche d’Henry Dunant.  Note4
[5] Sans doute faut-il voir dans ces « regrets » que Courier jouait au volant, jeu ancêtre du badminton, avec les deux sœurs Clavier et commentait Racine pour le plus grand plaisir du père de celles-ci.  Note5

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