Paul-Louis Courier

épistolier, pamphlétaire, helléniste
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prec [Sans mention] de Scigliano - août 1806 [sans mention]1 [Sans mention] de Mileto - 1806 Suiv

[7 septembre 1806]

Marianna Dionigi Marianna Dionigi M adame, Dieu veuille que ma dernière lettre ne vous soit pas parvenue. Je serais bien fâché vraiment que ce que je vous demandais fût parti ; c'étaient des papiers et des livres. Quant à mes habits, je ne les ai pas reçus ; mais je sais qui les a reçus pour moi, ce sont les Anglais. Vous aurez appris que nous perdîmes contre eux, il y a deux mois, une bataille et toute la Calabre. Nous regagnerons peut-être la Calabre, mais non la bataille. Ceux qui sont morts sont morts. Tout ce que nous pourrons faire, ce sera de leur tuer autant de monde qu'ils nous en ont tué. Bientôt, selon toute apparence, nous aurons cette consolation, ou pis que la première fois.
Quoi qu'il en soit la guerre m'occupe tout entier et je ne pourrai de longtemps penser à autre chose. Ainsi, Madame, je souhaite que, jusqu'à mon retour vous conserviez chez vous les petits effets dont vous avez bien voulu vous faire dépositaire.
Je remets au temps où j'aurai l'honneur de vous voir, Dieu aidant, le détail de nos désastres. C'est une histoire qui commence mal et dont peu de nous verrons la fin. Je ne suis pas des plus à plaindre puisque j'ai encore tous mes membres ; mais la chemise que je porte ne m'appartient pas ; jugez par là de nos misères.
Si, en conséquence de ma dernière lettre, vous m'aviez adressé quelque paquet à Naples, ayez la bonté de m'envoyer les renseignements nécessaires pour les réclamer. Je resterai ici tant qu'on y fera la guerre ; mais si l'on cesse de se battre, je cours aussitôt à Rome, et tous mes maux ne finiront que quand j'aurai le bonheur de vous revoir. Permettez, Madame, que je vous supplie de présenter mon respect à Madame votre mère, à Mademoiselle Henriette, et à Monsieur d'Agincourt, que vous voyez sûrement quelquefois ; me donner de leurs nouvelles et des vôtres, c'est le plus grand plaisir que vous me puissiez faire de si loin.
Je suis avec respect, Madame…


[1] Sautelet écrit : « A Madame Marianna Dionigi, à Rome. »
Née à Rome le 18 novembre 1757, décédée à Lanuvio, banlieue sud de Rome, le 10 juin 1826, Marianna Dionigi Candidi était l’épouse cultivée d’un jurisconsulte. Elle tenait salon à Rome. Elle était écrivain et peintre. Courier lui avait promis de traduire l’un de ses livres qui traitait de la perspective. Sa fille Henriette était poétesse.  Note1

trait

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