Paul-Louis Courier

Cronista, panflettista, polemista
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prec [Sans mention] de Florence - février 1808 [Sans mention] A M. Bonnaud de Florence - 21 février 1808 Suiv

Florence 17 février 1808

Monsieur,

J Jean Baptiste Louis Georges Seroux d'Agincourt (1730-1814) Jean Baptiste Louis Georges Seroux d'Agincourt (1730-1814) 'aurais bien voulu vous donner plus tôt de mes nouvelles et surtout avoir des vôtres ; mais vous allez voir que depuis mon départ de Rome j'ai toujours couru, et que je cours encore sans savoir où je vais. En vous quittant je vins ici, où je restai quinze jours enfermé avec Xénophon dans cette bibliothèque bâtie par Michel-Ange1. Il y faisait grand froid, et je regrettai fort Naples. Du reste, je ne vis rien de Florence, pas même la galerie. J'allai ensuite à Milan. J'y passai huit jours tristement perdus à faire des visites et des révérences. De là on m'envoya à Vérone. Mais en chemin je m'arrêtai quinze jours à Brescia, parce que j'y trouvai un de mes amis, officier du génie, qui revenait de Constantinople2. Lui échappé de Turquie et moi de la Calabre, je vous laisse à penser que de contes et quels entretiens ! Ce temps-là se passa donc fort agréablement. Je ne m'ennuyai point non plus à Vérone, où je fus un mois seul et libre. Je vis l'amphithéâtre. Je vis le musée Maffei3. On en a enlevé pour Paris les plus beaux morceaux. Vous crieriez à la barbarie ; moi, je crois toujours que tout est bien. Enfin je reçus l’ordre de me rendre ici avec un général d'artillerie4. Mais j'y suis venu avant lui et je l'attends sans impatience, car ce séjour-ci me plaît fort. Je sollicite pourtant, comme je vous ai dit que c'était mon dessein, un congé pour aller en France, chose qui se trouve plus difficile à obtenir que je n'avais cru. Je voudrais, Monsieur, avant, de repasser les monts, vous voir encore une fois, et je partirais content. Ce serait trop de dire que je l'espère ; mais je me flatte au moins que cela n'est pas impossible. Écrivez-moi, je vous prie, autant toutefois que vos yeux vous le permettront. Parlez-moi de votre santé. Vous savoir en bonne santé est la chose du monde que je désire le plus. Je vous ai laissé bien portant, mieux même qu'il y a dix ans. Je n'ai pas fait seul cette remarque, tout le monde l'a observé. Sauvez vos yeux, et tout va bien. Je crois que vous vous serez moqué de la rigueur de cet hiver. Mais moi, Napolitain, transporté tout à coup dans la Gaule cisalpine, je faisais pitié à voir. Permettez que je vous embrasse sans cérémonie.


[1] Il s’agit de la bibliothèque medico-laurentienne qui sera le lieu de l’affaire de la tache d’encre au début de novembre de l’année suivante.  Note1
[2] Il s’agit de Nicolas Haxo qui était alors chef de bataillon du génie et restera l’ami le plus cher de Courier jusqu’à la fin de sa vie.  Note2
[3] La guerre de 39-45 mit à mal ce musée.  Note3
[4] Aubry Darancey avec qui Courier était en excellents termes.  Note4

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