Paul-Louis Courier

Epistológrafo, libelista, helenista
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prec Sans mention de Florence le 3 mars 1810 [Sans mention][1] De M. Boissonade de Paris le 9 avril 1810 Suiv

Florence, avril 1810.

J Ambroise Firmin Didot Ambroise Firmin Didot (1790 - 1876)
 
'ai reçu, Monsieur, vos deux lettres relatives à la tache d'encre. Je ne vois plus M. Fauchet ; mais je doute fort qu'il voulût entrer pour rien dans cette affaire. Vous comprenez que chacun évite de se compromettre avec la canaille. C'est le seul nom qu'on puisse donner à l'espèce de gens qui aboient contre nous. Pour moi je ne m'en aperçois même pas. Les gazettes d'Italie sont fort obscures et ne peuvent vous faire grand bien ni grand mal. Au reste je ne souffrirai pas qu'on vous pende pour moi, et-je suis toujours prêt à crier : me, me, adsum qui feci2. Je déclarerai, quand vous voudrez que moi tout seul j'ai fait la fatale tache, et que je n'ai point eu de complices.
Je vous envoie par la poste ma petite drôlerie imprimée ici. Cela ne se pouvait autrement. Notre première idée était folle. Le morceau déterré devait paraître à sa place et je crois que vous en conviendrez.
On ne peut mettre assurément moins de génie dans un ouvrage qu'il n'y en a dans cette version. Voulez-vous avoir une idée de ma finesse comme traducteur ? Vous savez les vers de Guarini[3] : sentir si morir, se sentir mourir, e non poter dir, et ne pouvoir dire, morir mi sento, je me sens mourir. Voilà comme j'ai fait tout le long du Longus. Si cette innocence ne désarme pas la critique, il n'y a plus de quartier à espérer pour personne. Au reste, ceci n'est pas public. C'est une pièce de société qu’il n’est pas permis de siffler. Si cependant quelqu’un s’en moque, je dirai comme d’Aubigné, attendez ce foyer de la fidélité[4].


[1] Sautelet précise « A M. Renouard, à Paris ; Florence le 10 mars.»  Note1
[2] « C’est moi, c’est moi qui ai tout fait. » Citation prise dans l’Enéide, IX, vers 426.  Note2
[3] Erreur de Courier. L’auteur de cet aphorisme est Métastase qui écrit :

È pena troppo barbara Sentirsi, oh Dio, morir, E non poter mai dir : Morir mi sento !

 Note3
[4] Agrippa d’Aubigné avait trouvé dans une rue d’Agen un chien nommé Citron appartenant au roi de Navarre. Il composa un sonnet qu’il attacha au collier de l’animal. Le monarque récupéra son chien, vit le sonnet et le lut. Il en parut fort embarrassé. Voici le second tercet de ce sonnet :

Courtisans, qui jetez vos dédaigneuses vues Sur ce chien délaissé, mort de faim, par les rues, Attendez ce loyer de la fidélité.

 Note4

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